Queen Street

Queen Street

Aquarelle représentant une vue aérienne d'un imposant édifice institutionnel du 19e siècle entouré d'arbres

Cette carte postale n'aurait pas été possible san l'aide considérable de John Court des Archives du Centre de traitement des dépendance et de santé mentale de Toronto qui a fourni du matériel de recherche, de l'aide àla rédaction et des photographies d'archives.  Auteure : Sheila Gibbons

Nom(s) de l’institution:

1850 – Asile provincial (Provincial Lunatic Asylum)

1871 – Asile pour les malades mentaux (Asylum for the Insane, Toronto)

1907 – Hôpital pour les malades mentaux (Hospital for the Insane, Toronto)

1919 – Hôpital d’Ontario (Ontario Hospital, Toronto)

1966 – Centre de santé mentale de Queen Street (Queen Street Mental Health Centre)

Centre de traitement des dépendances et de santé mentale (Centre for Addiction and Mental Health) (1998)

Année d’ouverture:

1850

Lieu:

Toronto, Ontario

À l’origine 999 Queen Street West

Adresse transférée au 1001 Queen Street West en 1979

Période de désinstitutionnalisation:

1966-1976 (bâtiment démoli)

Démographie des patients:

Année Hommes Femmes Total
1850 211
1919 1,270
1960 731 627 1,348
1965 777 615 1,392
1967 463 622 769
1976 339

Désinstitutionnalisation:

En 1839, la province du Haut-Canada vota une loi légiférant la création de l’asile. Le 26 janvier 1850, l’Asile provincial ouvrit ses portes aux 211 premiers patients, qui furent transférés d’une ancienne prison. L’architecte JG Howard décrivit la forme du bâtiment comme étant « un bâtiment pour pratiquer des soins, pas pour incarcérer, à environ 500 malades mentaux du Haut Canada. »

En 1894, C.K. Clarke, le chef médical de l’époque à l’Asile Rockwood (Rockwood Asylum) à Kingston affirma dans son rapport annuel qu’ « il est difficile de faire prendre conscience aux non-professionnels et parfois aux professionnels qu’une personne atteinte de folie est quelqu’un qui souffre de problèmes corporels, aussi bien qu’un patient souffrant de fièvre de la typhoïde. Ils peuvent comprendre le délire qui accompagne la fièvre, mais considèrent l’excitation si caractéristique de la manie comme la maladie elle-même, plutôt que comme les signes de la maladie. Nous avons des hôpitaux pour les patients souffrant de fièvre. Pourquoi pas des hôpitaux pour des personnes souffrant de maladie mentale ? » (Ontario Legislative Assembly, Sessional Papers). Ce sentiment préfigura un mouvement pour retirer l’expression «asile» du nom de l’institution. En 1907, le bâtiment de Queen Street fut ainsi renommé l’Hôpital pour malades mentaux de Toronto.

Bâtiment institutionnel de briques de faible-sur-élevé
Le bâtiment administratif de Queen Street est achevé, 1956. (Archives du CAMH)

En 1956, on mit en place une nouvelle administration dans un bâtiment central situé devant le vieux bâtiment et comprenant une promenade le reliant à celui-ci. En 1964, le Ministère de la santé de l’Ontario annonça un projet de remplacement des structures de l’Asile de Queen Street par de nouveaux bâtiments sur le même site et, en 1966, le nom de l’institution devint le Centre pour la santé mentale de Queen Street. La construction de nouvelles unités commença en 1970 et, en 1976, le bâtiment de 1850 fut démoli.

En 1979, le Ministre de la santé, Dennis Timbrell, inaugura officiellement le Centre de santé mentale de Queen Street tout juste terminé. En cherchant symboliquement à rompre avec son passé de stigmatisation, on changea l’adresse du centre, de 1001 à 999 Queen Street. Un communiqué de presse du ministère annonça que le vieux bâtiment de Queen Street avait été modernisé. Il déclara :

Photographie en noir et blanc des années 1970 représentant à gauche un bâtiment moderne et à droite un édifice institutionnel du 19e siècle
L’ancien et le nouveau: cette photo de 1972 illustre la controverse suscitée par la démolition annoncée de l’ancien asile du XIXe siècle, qui voisine encore les nouveaux immeubles chargés de lui succéder. (Archives du CAMH)

…Nous avons désormais effacé toutes les traces des temps anciens, où la maladie mentale était quelque chose que la société tenait à l’écart (le mur élevé qui encercle le terrain et isole les patients du monde extérieur, les couloirs qui dégageaient une ambiance d’agitation et d’ennui, et les fenêtres trop protégées qui donnaient une image de prison. Désormais, on trouve un complexe qui reflète les nouvelles façons de penser le traitement de la maladie mentale, une politique favorable aussi bien aux patients qu’à la communauté.

Le Centre de traitement des dépendances  et de santé mentale fut créé en 1997, à la suite de la publication d’un rapport du Comité de restructuration des services de santé (Health Services Restructuring Committee) qui préconisa une fusion de l’ancienne Fondation de recherche sur les dépendances (Addiction Research Foundation), la Clarke Institute of Psychiatry, le Centre de santé mentale de Queen Street et le Donwood Institute pour créer un nouvel hôpital public.

Transinstitutionnalisation:

En 1933, on mit en place une « pension, » ce qui permit de dispenser des soins aux patients en consultation externe supervisés par le personnel de l’hôpital.

En 1968, le Centre de santé mentale de Queen Street mit en place trois programmes satellites de services communautaires. Le premier (le Centre de soins quotidiens de Dundas, situé au 349 Ontario Street) était un programme qui soulignait l’importance des consultations externes pour les personnes souffrant de troubles mentaux et visait à réduire la population résidente au 999 Queen Street. Le centre proposait des évaluations psychiatriques, de l’assistance, des soins quotidiens, des suivis, et des services de visites à domicile. Le suivi des patients sortis du Centre de Queen Street et l’aide à la « transition parfois difficile du statut de patient à celui de citoyen productif » devinrent ses objectifs principaux.

Le programme « Community Inn » offrait une large panoplie de services, aussi bien aux patients sortis du Centre de Queen Street, qu’aux autres membres de la communauté qui faisaient face aux « problèmes de la vraie vie. » Ses clients pouvaient accéder à de nombreux services de thérapie et de réhabilitation.

Enfin, pour le sud-est de Toronto, Spectrum mit en place un programme de services aux multiples facettes pour s’occuper des 200 patients à la journée dans la communauté. Elle proposait des services de consultation, des infirmières de santé publique, des agences d’assistance sociale et du personnel pour les visites à domicile et pour les familles en crise.

En 1976, The Archway proposait des programmes de soins préventifs durant trois demi-journées par semaines tels que des services d’assistance aux parents célibataires et des consultations avec des organismes de la communauté. Entre 50 et 80 anciens patients à Queen Street recevaient régulièrement des services de suivis depuis l’Archway.

Par ailleurs, les Services communautaires de York, sous la houlette de plusieurs agences de santé et d’assistance sociale, proposaient des ressources d’assistance légale et employaient à temps partiel plusieurs psychiatres, travailleurs sociaux et infirmières psychiatriques.

De la thérapie par le travail à l’ergothérapie :

Dès 1927, les premiers diplômés en ergothérapie de l’Université de Toronto constituèrent la base du personnel de Queen Street.

Photographie en couleurs des années 1950 représentant des femmes s'affairant à diverses activités dans une grande pièce avec des tables, des étagères et un chevalet
Atelier d’ergothérapie, pavillon administrative de Queen Street, 1959. (Archives du CAMH)

Le développement de services destines à réintégrer les patients dans la communauté débuta lorsque de nombreuses unités de patients furent converties en programmes de soins quotidiens et d’autogestion des soins dans le Centre. Pendant cette période, un atelier de thérapie industrielle situé hors du campus fut mis sur pied (dans Christie Street). Au sein de ce programme, jusqu’à 60 patients quotidiens, supervisés par quatre membres du personnel, étaient employés dans des taches sous-contractuelles. Le Centre de Queen Street offrit de nombreuses thérapies similaires à partir de la fin des années 1950.

En 1960, le Ministère de la santé mit en place un Service de réhabilitation ayant pour but de permettre l’accès aux services pendant l’hospitalisation et le suivi médical en dehors de l’hôpital. Le service devenait une entité de conseil et de consultation « aussi bien pour le public que pour les agences bénévoles dans toutes les phases de réhabilitation vocationnelle et sociale. »

Même si le service développa des services de formation et d’éducation en 1966, l’organisation reconnut que les instituts de formation technique étaient inadaptés aux besoins des patients sortis d’un hôpital pour malades mentaux. Pour pallier à ce manque, on instaura l’« Opération nouveau départ » (« Operation New Start ») avec une importante mise en avant des besoins de réhabilitation des patients souffrant de maladie mentale. Un de ces programmes autorisa les « centres de réhabilitation industriels » dans tous les hôpitaux de l’Ontario, permettant aux responsables des hôpitaux d’employer des patients pour travailler dans leurs hôpitaux. Ainsi, les programmes se déroulaient six heures par jour et cinq jours par semaine. Les patients étaient rémunérés (Pollock). De même, la Loi sur les services de réhabilitation vocationnelle (Vocational Rehabilitation Services Act) permit le développement ultérieur d’ateliers et d’autres programmes de formation qui offraient de la motivation et du soutien pour permettre aux personnes souffrant de maladie mentale d’habiter dans leurs propres maisons. En 1967, un amendement à la Loi sur les écoles secondaires (Secondary Schools Act) obligeait les écoles à proposer des services à ceux que l’on considéraient comme « attardés récupérables » (“trainable retarded”).

Du patient à la personne:

En 1966, on renomma l’hôpital Centre de santé mental de Queen Street pour refléter les nouvelles façons de considérer la santé mentale.

Photographie en couleurs représentants quatre membres de minorités visibles avec une affiche du CAMH au centre
Le Centre de traitement des dépendances et de santé mentale et son implication communautaire 2012: l’approche visant à servir la communauté est largement mise en évidence à travers une série de volets, dont certains sont représentés sur ce panneau. (Archives du CAMH)

Le complexe communautaire constitua la première phase de redéveloppement. On y trouvait des services de traitement à la journée, ainsi que des bâtiments pour les patients, le personnel et le public. Un gymnase, une piscine et une cafeteria entouraient une aire de visite.

En concordance avec la publication d’un document de politique provinciale intitulé « Les gens d’abord » (“Putting People First”), qui traitait en priorité les besoins de personnes souffrant de maladie mentale, le Centre mit en place une approche de « thérapie communautaire », dans laquelle les patients et le personnel collaboraient pour le traitement.

Le Conseil des patients de Queen Street fut mis en place en 1992. Ce « Conseil de responsabilisation » a un conseil d’administration indépendant et continue de promouvoir les intérêts des patients aujourd’hui. Le conseil se veut une voix pour les personnes recevant des soins hospitaliers. Il se fait l’avocat des patients, survivants et ex-patients qui furent institutionnalisés dans le cadre de la lutte pour la santé mentale et contre l’addiction.

Le personnel durant la période de désinstitutionnalisation:

Photographie en noir et blanc des années 1970 représentant un groupe des employés de bureau en réunion
Réunion du personnel d’un département de soins dans les années 1970 reflétant l’important rôle clinique exercé par les infirmières psychiatriques et leurs collègues. (Archives du CAMH)

Les phases de démolition et de reconstruction dans les années 1970 eurent un effet dramatique sur la perception du 999 Queen Street. Un membre du personnel remarqua que « les professionnels commencèrent à nous considérer comme une organisation où envoyer des personnes, pas juste un dépotoir. » Les nouveaux bâtiments et les nouveaux régimes de traitement devinrent une source de fierté, d’enthousiasme et d’espoir au sein du personnel.

En 1973, on rapporta que le personnel était constitué de psychiatres, médecins, infirmières, travailleurs sociaux, psychologues, ergothérapeutes, chapelains, agents de réhabilitation et personnel pour la récréation, qui contribuaient tous au traitement. Ensemble, ce personnel développa des programmes de traitement conçus spécifiquement pour chaque individu de manière individuelle.

Bibliographie:

Baird, George. “999 Queen: Why Was it Torn Down?” City Magazine 2, no. 3&4 (Summer 1976). Clarke Institute Fonds, CAMH Archives.

Ballon, Diana. “Looking Back: Reflections on Community Mental Health in Ontario.” Canadian Mental Health Association, Ontario Division. https://ontario.cmha.ca/network/looking-back-reflections-on-community-mental-health-in-ontario/.

Centre for Addiction and Mental Health (CAMH). Breaking Down the Barriers: The CAMH Story. Permanent archival-historical exhibition. CAMH Doctors Association Building, 101 Stokes Street, Toronto, ON. 2012

Centre for Addiction and Mental Health (CAMH). New Mental Health Centre is Officially Dedicated. Toronto: CAMH, January 30, 1979.

Court, John P. M. “From 999 to 1001 Queen Street: A Consistently Vital Resource.” In The Provincial Asylum in Toronto: Reflections on Social and Architectural History, edited by E. Hudson, chapter 10. Toronto: Toronto Architectural Conservancy, 2000.

Ontario Department of Health. Ontario Department of Health Annual Reports–Mental Health Branch. Toronto: Archives of Ontario. 1950–1967.

Pollock, Sheila Joy. “Social Policy for Mental Health in Ontario, 1930–1967.” PhD dissertation, University of Toronto, 1974.

Queen Street Mental Health Centre (QSMHC), Asylum File 722. Informational Booklet: For Our Patients and Visitors. 1973. CAMH Archives.

Queen Street Mental Health Centre (QSMHC), Asylum File 722. Hospital Procedures: Homes for Special Care Programme. 1973. CAMH Archives.

Queen Street Mental Health Centre (QSMHC), Asylum File 722. Summary of Queen Street Mental Health Centre. 1977. CAMH Archives.

Thomson, William James. Picture of the Institution, 1890. Watercolour painting. Collection of the Centre for Addiction and Mental Health Archives, Toronto. https://www.camh.ca/en/hospital/about_camh/CAMH_redevelopment/history_of_queen_street_site/Pages/history_of_queen_street_site.aspx.